Blaise Compaoré est arrivé à Ouagadougou jeudi 7 juillet en début d’après-midi dans un vol privé affrété par les autorités ivoiriennes. Un retour rendu possible par la junte au pouvoir, officiellement, pour des entretiens avec le président de la transition, le lieutenant-colonel Damiba, et les anciens présidents du pays. Mais Blaise Comaporé a été condamné, en avril, à la prison à vie, pour son rôle dans l’assassinat de Thomas Sankara. Après près de 8 années d’exil, son retour sans être écroué fait donc polémique.

Quand Blaise Compaoré s’enfuit en octobre 2014, chassé par une insurrection populaire et lâché par l’armée, c’est en Côte d’Ivoire qu’il atterrit. Un an plus tard, la justice militaire burkinabè lance un mandat d’arrêt international contre lui pour son implication dans la mort de Thomas Sankara, assassiné en 1987 lors du coup d’État qui porte Blaise Compaoré au pouvoir.
En 2016, il obtient la nationalité ivoirienne, ce qui complique toute possibilité d’extradition. Il y a trois ans, alors que le pays est en proie aux attaques terroristes, Blaise Compaoré écrit une lettre au président en place, Roch Marc Christian Kaboré.
Il y exprime sa « disponibilité » à soutenir toutes les initiatives en vue de la promotion de la paix. Des discussions pour un éventuel retour sont entamées. L’an dernier, le ministre burkinabè de la Réconciliation nationale, Zéphirin Diabré, se rend à Abidjan pour le rencontrer.
Mais le 6 avril dernier, Blaise Comparé est condamné à distance à la perpétuité par la justice de son pays pour son rôle dans l’assassinat de Thomas Sankara.

Face à ce retour de l’ancien chef d’État, les ayants droits des victimes du coup d’État de 1987 demandent que « les autorités judiciaires prennent toutes leurs responsabilités. » Maître Ambroise Farama, avocat des parties civiles dans le procès des assassins de Thomas Sankara, décrit même une situation de « pure illégalité ». Pour les conseils des ayants droits des victimes, la loi est claire : l’arrêt qui condamne Blaise Compaoré à la perpétuité dans l’affaire Sankara vaut mandat d’arrêt. Ainsi, dès qu’il foule le territoire burkinabè, l’ancien président doit être arrêté.

C’est un scénario pitoyable auquel nous sommes en train d’assister, qui remet en cause tout ce qu’on a construit depuis huit ans pour faire ne sorte que l’État de droit prenne racine au Burkina Faso. Désormais, la justice est discréditée. La réconciliation ne se décrète pas, elle ne s’impose pas.

C’est pourtant libre qu’il a quitté l’aéroport de Ouagadougou jeudi et qu’il se rendra ce vendredi à une réunion avec d’autres anciens chefs d’État burkinabè. Dans un communiqué, la présidence a toutefois assuré que « cette rencontre n’entrave pas les poursuites judiciaires engagées contre certains. » Tandis que la présidence ivoirienne, elle, affirmait avoir obtenu tous les gages d’assurance que Blaise Compaoré ne risquerait pas l’emprisonnement.
Pour Pierre-Olivier Sur, avocat de Blaise Compaoré, le « Burkina est en train d’écrire sa grande histoire et le droit suivra. » Le conseil table notamment sur une amnistie ou une grâce présidentielle. Une issue qui serait « malvenue » selon maître Ambroise Farama, d’autant que Blaise Compaoré a refusé d’affronter la justice burkinabè.

Ce n’est pas la décision de justice qui compte, c’est le moment de réconciliation qui, au contraire, s’impose. Et bien évidemment, le droit suivra. Ce sera soit une amnistie, soit je ne sais quel texte qui scellera par le retour au pays dans la cadre de la réconciliation, une impunité maintenant.