Cette annonce intervient après plusieurs semaines d’une crise politique déclenchée par le ministre de l’intérieur, Matteo Salvini (Ligue, extrême droite) et signe la fin de quatorze mois de cohabitation entre la Ligue et le M5S.
L’Italie n’a plus de gouvernement. Le président du conseil, Giuseppe Conte, a annoncé sa démission, mardi 20 août, lors d’un discours au Sénat après quatorze mois au pouvoir. « J’interromps ici cette expérience de gouvernement. J’entends conclure ce passage institutionnel de façon cohérente, a-t-il déclaré. J’irai voir le président de la République [Sergio Mattarella] pour lui présenter ma démission. »
Cette annonce intervient après plusieurs semaines d’une crise politique déclenchée en plein coeur de l’été par son vice-président du conseil et ministre de l’intérieur, Matteo Salvini (Ligue, extrême droite). Au cours de son discours, M. Conte s’en est pris à plusieurs reprises à son ministre de l’intérieur :
« Matteo Salvini a rompu le contrat de gouvernement et a agi par intérêt personnel et politique, compromettant l’intérêt général. Quand une force politique [qui gouverne] fait ses choix uniquement par intérêt électoral, elle ne compromet pas que la noblesse de la politique, mais aussi les intérêts nationaux du pays entier. Sa décision pose un risque grave pour ce pays. »
Pour M. Conte, cette crise déclenchée par M. Salvini « expose notre pays à de graves risques dans le contexte d’une situation internationale qui n’est certainement pas favorable ». L’alliance inédite entre le parti d’extrême droite, la Ligue et le mouvement antisystème M5S vit donc sa dernière journée à la tête de l’Italie. M. Salvini a affiché publiquement, depuis le début du mois d’août, de profonds désaccords avec Giuseppe Conte, notamment sur le chantier de la ligne de train Lyon-Turin et l’accueil de navires humanitaires dans les ports italiens, dans l’espoir de faire tomber la coalition au pouvoir depuis quatorze mois et organiser de nouvelles élections dès l’automne.
Salvini en campagne tout l’été
Matteo Salvini pensait pouvoir miser sur l’effet de surprise, sur le faible poids politique du M5S et de son représentant principal au gouvernement, Luigi di Maio, et sur des sondages le créditant de 36 à 38 % des intentions de vote – plus du double qu’au moment des dernières élections législatives, en 2018 – pour y parvenir.
En campagne permanente depuis le début de l’été, très présent sur les plages des côtes italiennes à la rencontre de vacanciers, l’homme fort du gouvernement a, cependant, sous-estimé la capacité de nouvelles alliances entre les forces en présence au Parlement italien. Dès le 8 août, M. Conte avait d’ailleurs rapidement recadré son vice-président du conseil, en l’appelant à « expliquer et justifier » au Parlement sa décision de mettre un terme brutal à une nouvelle expérience de gouvernement.
Dans une lettre ouverte destinée au président du conseil diffusé mardi matin, Luigi di Maio a apporté son soutien à M. Conte qu’il qualifie de « perle rare, serviteur de la nation que l’Italie ne peut pas perdre ». Avant la séance, des manifestants ont déployé une banderole « Conte, l’Italie t’aime » près du parlement pour soutenir le premier ministre. Signe de la tension ambiante, des sénateurs de la Ligue ont été insultés à leur arrivée aux cris de « partez bouffons, dehors la mafia », tandis que des partisans de Salvini scandaient « Matteo Matteo », derrière une banderole disant « Salvini, ne lâche rien ».
Matteo Renzi face à Matteo Salvini
Deux offres de coalition se sont depuis publiquement constituées face à l’offensive de Matteo Salvini. Une première est venue, à la surprise générale, de l’ancien chef de gouvernement Matteo Renzi, bête noire tout autant de M. Salvini que du M5S. M. Renzi a proposé une réconciliation et lancé l’idée d’un gouvernement « institutionnel », alliant sa formation, le Parti démocrate (PD, centre gauche) et le M5S. Au programme, l’élaboration du budget 2020 de façon à éviter une hausse de la TVA qui interviendra automatiquement en janvier 2020, si rien n’est fait pour combler un trou de 23 milliards d’euros dans les caisses publiques.
Une autre piste a été suggérée par l’ex-premier ministre et président de la Commission européenne Romano Prodi, qui propose un gouvernement proeuropéen baptisé « Ursula », du nom de la nouvelle présidente de la Commission, l’allemande Ursula von der Leyen. Dans son esprit, il s’agirait d’une alliance gauche-droite pouvant inclure Forza Italia de Silvio Berlusconi, à la manière des coalitions allemandes, pour que l’Italie redevienne « un membre actif de l’Union européenne ».