Etudiante de 22 ans, grand espoir du lancer de disque, Daisy Osakue a été agressée près de Turin par deux jeunes encore non identifiés, dimanche 29 juillet 2018. Italienne originaire du Nigeria, elle se dit convaincue d’avoir été blessée en raison de la « couleur noire » de sa peau. Un épisode de violence loin d’être isolé depuis quelques mois, et qui laisse de glace le ministre de l’Intérieur et chef de la Ligue, Matteo Salvini.

Daisy Osaku est une jeune athlète italienne spécialiste du lancer de disque. Elle figure parmi les plus talentueuses de sa discipline. Mais sa carrière a failli s’achever en quelques secondes. Née à Turin de parents nigérians, elle a été blessée à un œil dans un quartier de sa propre ville, après avoir reçu un œuf en plein visage, lancé violemment depuis une voiture.

Souffrant d’une abrasion et de lésions à la cornée, la jeune femme n’est pas assurée de pouvoir participer aux prochains championnats d’Europe la semaine prochaine à Berlin. Ses agresseurs n’ont pas encore été identifiés. Mais Daisy assure qu’elle a été attaquée en raison de la couleur de sa peau, explique notre correspondante à Rome, Anne Le Nir.

 « Sept cents délits commis chaque jour en Italie par des immigrés »

De fait, son nom s’ajoute à la longue liste de personnes d’origine africaine qui ont subi, très récemment, des actes de violence. Le week-end dernier, au sud de Rome, un Marocain de 43 ans a été pris en chasse parce qu’on l’accusait d’être un cambrioleur. Il est mort à l’hôpital après percuté un muret puis avoir été frappé. A Palerme, un Sénégalais de 19 ans qui se tenait devant un bar a été roué de coups par un groupe d’Italiens aux cris de « sale nègre ».

Le cas de Daisy Osaku a ému bon nombre d’Italiens. Mais le ministre de l’Intérieur et chef de la Ligue, parti d’extrême droite souverainiste, lui a simplement souhaité « bonne guérison ». Sans s’interroger sur l’accumulation d’agressions à caractère raciste. Il a d’ailleurs répondu aux accusations de l’opposition en ces termes : « Il y aurait un climat raciste en Italie ? Ne disons pas de bêtises ! »

« La nouveauté, c’est que les médias évoquent les épisodes de ce genre même si le nombre d’agressions n’a pas évolué », dénonce l’actuel homme fort du gouvernement. « Qui les utilise contre le gouvernement ne s’attaque pas vraiment au problème du racisme », ajoute-t-il, avant de contre-attaquer : « Je rappelle qu’il y a environ 700 délits commis chaque jour en Italie par des immigrés, soit près d’un tiers du total, et ceci est la seule vraie urgence pour laquelle je me bats en tant que ministre. »

Après cette charge liant immigration et délinquance, à laquelle le ministère de l’Intérieur a donné de l’écho en publiant ses propres chiffres venant corroborer le propos ministériel, M. Salvini a tenu à rassurer : « Toute agression sera punie et condamnée, je serai toujours au côté de qui subit des violences. »

« Beaucoup d’ennemis, beaucoup d’honneur », paraphrase Salvini

La semaine dernière, le président de la République s’en est pris à la rhétorique de Matteo Salvini, en évoquant le cas d’un tir au pistolet à air comprimé ayant blessé une fillette rom qui marchait dans la rue avec sa mère. L’auteur évoque un acte accidentel. « L’Italie ne peut pas devenir un Far West où une partie de la population achète un fusil et tire du balcon en blessant une fillette d’un an, détruisant sa santé et son avenir », a prévenu Sergio Mattarella.

Le discours de M. Salvini lui vaut aussi des attaques des catholiques. En témoigne la Une du magazine Famiglia Cristiana la semaine dernière : « Vade retro Salvini ». Mais le ministre semble prendre ces hostilités avec philosophie. « Beaucoup d’ennemis, beaucoup d’honneur », a-t-il écrit dimanche matin sur les réseaux sociaux. Il s’agissait d’un clin d’œil à Benito Mussolini envoyé le jour de l’anniversaire du Duce.

RFI