Chrétienne, condamnée à mort pour blasphème, Asia Bibi a passé huit ans en prison avant d’être acquittée. Elle vit aujourd’hui au Canada, mais désire obtenir l’asile en France. Au Pakistan, à majorité musulmane, la question du blasphème, souvent instrumentalisée, pose toujours de graves problèmes. RFI a rencontré Saif ul-Malook, l’avocat qui a sauvé Asia Bibi.

« Les gens sont très sensibles pour tout ce qui a trait à la religion, au prophète Mohammed (la paix soit sur lui), souligne Saif ul-Malook. Même les plus instruits deviennent des fondamentalistes. Pour moi, ils ne comprennent même pas le Coran et les enseignements du prophète. Parce que le Coran dit qu’il est bien mieux de libérer 99 coupables que de condamner un innocent. »

Les lois sur le blasphème sont extrêmement strictes et aucun politique n’ose les critiquer ouvertement. Très peu d’avocats défendent les personnes accusées de blasphème, parce que, estime Saif ul-Malook, le gouvernement ne les soutient pas  : « Le gouvernement subit une pression de ces religieux parce qu’ils votent. Pendant l’appel d’Asia Bibi, pendant trois semaines ils ont tenu dans tout le pays des meetings, des conférences de presse disant qu’ils allaient tuer les juges de la Cour suprême et les avocats si Asia Bibi était libérée. Si le gouvernement les avait alors arrêtés et jugés pour sédition, les choses se seraient passées différemment. »

Finalement, plusieurs dizaines d’entre eux ont été condamnés en janvier 2020 à 55 ans de prison chacun. Mais selon un autre avocat, si la voix des plus extrêmes est depuis moins audible, pour les juges chargés de ces affaires la peur est toujours là.

Asia Bibi demande l’asile à la France pour elle, son mari et ses deux filles. Cette paysanne analphabète devenue le symbole des exactions de la loi sur le blasphème au Pakistan avait été accueillie au Canada dans un lieu tenu secret. Aujourd’hui, c’est dans la patrie de la journaliste française Anne-Isabelle Tollet, à qui elle doit en grande partie sa libération, qu’elle veut vivre.

Je pense qu’il est absolument nécessaire pour chaque être humain de bénéficier d’une liberté religieuse et c’est exactement l’impression que j’ai eue en France.

Par RFI